jeudi 14 novembre 2013

Les lois canadiennes anti-haine et la liberté d’expression



Table des matières
1 Introduction
2 Les Lois sur les droits de la personne et la Charte
2.1 Les lois sur les droits de la personne
2.2 La Charte canadienne des droits et libertés
3 La liberté d'expression au Canada
4 Les infractions relatives à l'incitation à la haine prévues par le Code criminel
5 La liberté d’expression et la Loi canadienne sur les droits de la personne

5.1 L’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne
5.1.1 Autres mesures législatives contenant des dispositions analogues
5.1.2 Constitutionnalité de l’article 13
5.1.3 Demandes de révision de l’article 13
5.1.4 Rapports de la Commission canadienne des droits de la personne concernant l’article 13
5.1.4.1 Le rapport Moon
5.1.4.2 Le rapport spécial de la Commission canadienne des droits de la personne au Parlement
5.1.4.3 Projet de loi C-304
5.2 L’article 12 de la Loi canadienne sur les droits de la personne
6 Conclusion
Annexe A - Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. 1985, ch. H-6, modifiée) articles 12 et 13
Annexe B - Code criminel (L.R.C. 1985, ch. C-46, modifié) articles 318 à 320.1
Notes

1 Introduction

Au Canada, diverses lois aux échelons fédéral, provincial et territorial imposent des restrictions à la liberté d’expression garantie par l’alinéa 2b) de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte)1. Par exemple, le Code criminel (le Code)2 comporte de nombreuses restrictions de ce genre sous forme d’infractions comme le libelle diffamatoire, le fait de conseiller le suicide, le parjure et la fraude. L’ancien juge en chef de la Cour suprême du Canada Antonio Lamer classe ces infractions dans les catégories suivantes : « [l]es infractions contre l’ordre public, les infractions liées au mensonge, les infractions contre la personne et la réputation, les infractions contre l’administration du droit et de la justice et les infractions contre la moralité publique et contre la conduite désordonnée3 ».

Les « lois anti-haine » font partie de ces mesures législatives qui limitent la liberté d’expression. Elles sont nommées ainsi parce qu’elles ont pour objet de restreindre la publication de messages dont le but est d’inciter à la haine contre les membres de groupes en particulier. Par exemple, l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP)4 qualifie d’acte discriminatoire le fait, pour quiconque, d’utiliser un téléphone en recourant aux services d’une entreprise de télécommuni-cation ou en utilisant un ordinateur, notamment Internet, pour aborder des questions susceptibles d’exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable. Les articles 318 et 319 du Code interdisent d’encourager au génocide ou d’inciter à la haine dans un endroit public. La Cour suprême du Canada a statué que ces restrictions à la liberté d’expression sont justifiables aux termes de la Charte et des limites raisonnables qu’elle permet d’imposer aux droits et libertés dans une société libre et démocratique comme le Canada. Selon la Cour, le tort causé par la propagande haineuse est incompatible avec les aspirations à la liberté d’expression ou les valeurs de l’égalité et du multiculturalisme énoncées aux articles 15 et 27 de la Charte5.

Depuis quelques années, un certain nombre de personnes et d’organisations réclament la révision des lois canadiennes anti-haine, plus particulièrement l’abrogation de l’article 13 de la LCDP (et tout pendant dans les lois provinciales). Un projet de loi d’initiative parlementaire (C-304) a aussi été présenté à cette fin à la Chambre des communes en 20116. On a également réclamé une réforme plus vaste qui viserait les institutions canadiennes chargées de défendre les droits de la personne pour qu’elles modifient la manière dont elles traitent les plaintes pour propagande haineuse. Certains insistent pour que le Parlement maintienne, s’il y avait une réforme, la compétence de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) et du Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP) pour traiter et instruire des cas de propagande haineuse.

La présente publication s’intéresse à l’article 13 de la LCDP, aux dispositions con-nexes de l’article 12, aux dispositions anti-haine du Code et à la garantie constitu-tionnelle de liberté d’expression prévue par la Charte. Elle examine d’abord la nature des protections en matière de droits de la personne prévues par la LCDP et par la Charte pour ensuite se pencher sur la compétence de la CCDP et du TCDP. Enfin, elle analyse brièvement les lois anti-haine au Canada et l’incidence possible de certaines modifications proposées à la LCDP.
2 Les Lois sur les droits de la personne et la Charte

La révision de 1982 a inscrit les droits de la personne dans la Constitution du Canada au moyen de la Charte. L’adoption de la Charte n’a cependant pas rendu inutiles les dispositions législatives sur les droits de la personne, ni atténué leur importance. Au contraire, c’est depuis l’adoption de la Charte que les tribunaux canadiens considèrent les codes relatifs aux droits de la personne comme étant quasi constitutionnels, ce qui veut dire que les lois canadiennes sont, en règle générale, interprétées conformément aux lois sur les droits de la personne7.
2.1 Les lois sur les droits de la personne

Les « droits de la personne » ne font pas partie des chefs de compétence énumérés aux articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 (qui énoncent la répartition des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux). Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont donc adopté des lois sur les droits de la personne pour s’occuper de diverses questions relevant de leur compétence8. Les lois canadiennes sur les droits de la personne comportent des différences, mais leurs principes et mécanismes d’application sont très similaires : toutes interdisent la discrimination pour des motifs précis tels que la race, le sexe, l’âge ou la religion, et ce dans le contexte de l’emploi, du logement et des services à caractère public. L’application des lois sur les droits de la personne est un système fondé sur les plaintes. En effet, pour que le mécanisme prévu par la loi s’enclenche, une plainte pour discrimination doit habituellement être déposée devant une commission ou un conseil des droits de la personne soit par quelqu’un qui croit être victime de discrimination, soit par la commission elle-même à partir d’une enquête qu’elle a menée.

La LCDP, principale loi fédérale sur les droits de la personne9, s’applique en règle générale aux sociétés d’État, ministères et organismes fédéraux, ainsi qu’aux entreprises assujetties à la réglementation fédérale10 (exception faite de l’art. 13 puisque, comme cela sera expliqué plus loin, cette disposition s’applique à quicon-que au Canada). Cette loi interdit à tout employeur ou fournisseur de services assujetti à la réglementation fédérale de recourir à des pratiques discriminatoires fondées sur certains motifs illicites, soit la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe (ce qui comprend la grossesse et l’accouche-ment), l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience mentale ou physique (y compris la toxicomanie ou l’alcoolisme, passé ou présent) et l’état de personne graciée.

Lorsqu’elle reçoit une plainte en vertu de la LCDP et la juge fondée, la CCDP tente habituellement une conciliation entre le plaignant et le mis en cause. Si la conciliation échoue, le TCDP peut instruire l’affaire et décider d’ordonner une réparation ou de rejeter la plainte. Contrairement aux cours, les tribunaux des droits de la personne sont des organismes spécialisés dotés de vastes pouvoirs leur permettant d’ordon-ner une réparation qui puisse remédier aux problèmes sociaux particuliers qui sous-tendent une plainte pour discrimination. S’il juge qu’une plainte contre un acte discri-minatoire est fondée, le TCDP peut ordonner le paiement d’une amende, le verse-ment d’une indemnité à la victime, la cessation des actes discriminatoires, ainsi que la mise en œuvre d’autres mesures correctives ou programmes adaptés à la situa-tion. Les décisions de la CCDP et du TCDP peuvent faire l’objet d’un contrôle judi-ciaire par la Cour fédérale du Canada. Il est également possible d’en appeler de la décision de la Cour fédérale devant la Cour suprême du Canada.
2.2 La Charte canadienne des droits et libertés

La Loi constitutionnelle de 1982 confère aux droits de la personne et aux libertés fondamentales une importance juridique accrue grâce à la Charte, laquelle inscrit ces droits et libertés dans la loi fondamentale du pays. En effet, le paragraphe 52(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 énonce expressément que « [l]a Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérantes les dispositions incom-patibles de toute autre règle de droit ». Par conséquent, toutes les lois canadiennes doivent être conformes à la Charte et seront interprétées par les tribunaux canadiens en conformité avec sa suprématie.

Les garanties offertes par la Charte peuvent toutefois être assujetties à certaines limites. Premièrement, la Charte ne s’applique qu’aux relations entre les gouverne-ments et le public. L’article 32 dispose que la Charte s’applique au Parlement fédé-ral, aux législatures provinciales, ainsi qu’aux gouvernements fédéral et provinciaux. La Charte ne régit donc pas, en règle générale, les actes privés des particuliers ou des sociétés. Deuxièmement, l’article premier énonce que tous les droits et libertés garantis par laCharte « ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique11 ». Autrement dit, une fois que la viola-tion d’un droit garanti par la Charte est établie, les tribunaux doivent déterminer si cette violation peut être considérée comme justifiée par le gouvernement respon-sable. Cela les oblige à se livrer à un exercice d’évaluation très discrétionnaire afin de mettre en balance les intérêts stratégiques du gouvernement et les intérêts du plaignant qui prétend avoir été lésé dans ses droits. Comme cela a été mentionné précédemment, une loi ou une partie de cette loi peut, aux termes de l’article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982, être jugée inconstitutionnelle et abolie12; il peut aussi arriver que les droits d’une personne garantis par la Charte soient limités pour des motifs valables en vertu d’une loi jugée constitutionnelle.

Les particuliers et les groupes dont les droits garantis par la Charte ont été violés peuvent demander réparation en vertu du paragraphe 24(1), qui prévoit que toute victime peut s’adresser à un tribunal compétent pour obtenir une réparation convenable. L’article 24 a une portée très vaste, car il permet aux tribunaux d’accorder des types de réparation personnalisés jugés « convenables et justes » eu égard aux circonstances. En revanche, et bien qu’ils aient généralement des pouvoirs de réparation étendus, les tribunaux des droits de la personne peuvent seulement prendre les mesures prévues par la loi qui les régit.

Étant donné que la Charte s’applique à l’ensemble des lois et règlements fédéraux, provinciaux et municipaux, ainsi qu’à toute activité gouvernementale, elle s’applique aussi aux lois sur les droits de la personne et peut donc avoir une incidence sur le comportement des particuliers et des entreprises. La Charte et les lois sur les droits de la personne peuvent se chevaucher dans les cas où il peut être démontré que l’acte discriminatoire a été commis par le gouvernement dans le contexte de l’emploi ou de la fourniture de services, d’installations ou de moyens d’hébergement. De fait, les garanties antidiscriminatoires prévues à l’article 15 de la Charte et celles des lois fédérales, provinciales et territoriales sur les droits de la personne empiètent souvent les unes sur les autres. Les décisions rendues jusqu’à présent par les tribunaux dans ce domaine donnent à penser que ces dispositions reposent sur la même philosophie et qu’il y a chevauchement de compétences à bien des égards. L’article 15 garantit le droit à l’égalité et le paragraphe 15(1) dispose que :
La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

Bien que la liste des motifs de distinction illicite énoncés à l’article 15 équivale à celle de la plupart des lois sur les droits de la personne, les cours interprètent les motifs énoncés à cette disposition comme s’appliquant aussi à des motifs de distinction analogues13.
3 La liberté d'expression au Canada

La liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression est protégée en tant que garantie constitutionnelle fondamentale au titre de l’alinéa 2b) de la Charte, qui y ajoute la « liberté de la presse et des autres moyens de communication ». Comme cela a été mentionné précédemment, les libertés prévues à l’alinéa 2b) et ailleurs dans laCharte peuvent toutefois être assujetties à certaines limites. La liberté de parole est considérée comme un droit de la personne et une liberté fondamentale aux termes de l’alinéa 1d) de la Déclaration canadienne des droits14, au même titre que la liberté de religion et la liberté de la presse.

Il arrive que les lois fédérales et provinciales imposent intentionnellement des restrictions à la liberté d’expression, soit pour respecter l’intention de la loi, soit par voie de conséquence indirecte. Comme cela a été mentionné précédemment, lorsque ces lois sont contestées en vertu de la Charte devant les tribunaux cana-diens, les juges doivent décider si ces lois sont toujours conformes à la disposition limitative de l’article premier de la Charte. Pour justifier des restrictions à la liberté d’expression, on doit habituellement atteindre un équilibre entre des valeurs concur-rentes. Par exemple, les films et émissions de télévision qui traitent de sujets destinés à un auditoire adulte font souvent l’objet d’une censure ou de restrictions afin d’empêcher les enfants de les voir en totalité ou en partie. En l’espèce, on établit un équilibre entre le droit du cinéaste à la liberté d’expression et le désir de mettre un groupe de personnes vulnérables à l’abri d’images qui peuvent ne pas lui convenir ou qui risquent même de lui nuire.

Au Canada, tribunaux, juristes et autres personnes intéressées ont beaucoup écrit sur les justifications fournies pour garantir ou limiter la liberté d’expression; le débat est relancé chaque fois que de nouvelles technologies ou innovations produisent des formes d’expression inédites, qui sont alors réglementées en vertu des lois canadiennes. Les défenseurs du droit à la liberté d’expression font valoir que ce droit joue un rôle important en tant qu’« instrument de gouvernement démocratique », « instrument de vérité » ou « instrument d’épanouissement personnel15 ».

Les lois canadiennes peuvent limiter la liberté d’expression de diverses façons et pour divers motifs. Comme cela sera expliqué dans la section suivante, la LCDP et le Codeinterdisent de publier des messages incitant à la haine. Se parjurer, conseiller le suicide et produire de la pornographie juvénile sont toutes des formes d’expression, mais la loi leur impose des restrictions en les désignant infractions criminelles. L’interdiction de publier les résultats de sondages sur les intentions de vote le jour du scrutin tant que les bureaux de vote sont encore ouverts16 limite la liberté de la presse au Canada, mais fait en sorte que les électeurs ne soient pas influencés indûment par des sondages de dernière minute. Comme cela a été mentionné précédemment, certains médias, comme les films, les magazines ou les livres, peuvent être censurés ou voir leur distribution limitée. Au Canada, les lois provinciales et fédérales sur la diffamation restreignent elles aussi la liberté d’expression, mais sont adoptées pour protéger la réputation d’autrui. Ces exemples démontrent que la liberté d’expression n’est pas absolue au Canada; elle peut en réalité être limitée au profit d’autres valeurs auxquelles est octroyée une plus grande importance sociale.
4 Les infractions relatives à l'incitation à la haine prévues par le Code criminel

Le Code contient des dispositions visant la propagande haineuse depuis 197017. Le Parlement les y a ajoutées à la suite d’une série d’incidents et d’événements survenus dans les années 1960, époque où certains groupes de néo-nazis et de militants pour la suprématie blanche, basés en grande partie aux États-Unis, étaient actifs au Canada. Ces groupes et individus diffusaient principalement de la propa-gande antisémite et anti-Noirs. Les dispositions du Code portant sur la propagande haineuse ont été conçues essentiellement pour viser ces activités18.

Les infractions et les dispositions connexes sur la fomentation de la haine se trouvent aux articles 318 à 320.1 du Code19. En vertu de l’article 318, quiconque préconise ou fomente un génocide est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans. « Génocide » s’entend du fait de tuer les membres d’un groupe identifiable ou de le soumettre délibérément à des conditions de vie propres à entraîner sa destruction physique. Aux termes du paragraphe 318(4), « groupe identifiable » désigne toute section du public qui se différencie des autres par la couleur, la race, la religion, l’origine ethnique ou l’orientation sexuelle. Aucune poursuite ne peut être engagée en vertu de cette disposition sans le consentement du procureur général provincial.

Le paragraphe 319(1) dispose que quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à la haine contre un groupe identifiable, lorsqu’une telle incitation est susceptible d’entraîner une violation de la paix, est coupable soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans, soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

En vertu du paragraphe 319(2), commet un acte criminel quiconque, par la communication de déclarations autrement que dans une conversation privée, fomente volontairement la haine contre un groupe identifiable. Aux termes du paragraphe 319(7), « communiquer » s’entend notamment de la communication par téléphone, radiodiffusion ou autres moyens de communication visuelle ou sonore20; « déclarations » s’entend notamment des mots parlés, écrits ou enregistrés par des moyens électroniques ou électromagnétiques ou autrement, et des gestes, signes ou autres représentations visibles; « endroit public » désigne tout lieu auquel le public a accès de droit ou sur invitation, expresse ou tacite.

Il ne peut être engagé de poursuite en application du paragraphe 319(2) sans le consentement du procureur général provincial. Quiconque est accusé en vertu de cette disposition du Code peut se prévaloir des quatre défenses spéciales énoncées au paragraphe 319(3) :
les déclarations communiquées étaient vraies;
de bonne foi, la personne a exprimé une opinion ou un argument sur un sujet religieux ou sur un texte religieux auquel elle croit;
les déclarations se rapportaient à une question d’intérêt public et il y avait des motifs raisonnables de croire qu’elles étaient vraies;
de bonne foi, la personne voulait attirer l’attention sur des questions provoquant ou de nature à provoquer des sentiments de haine à l’égard d’un groupe identifiable afin qu’il y soit remédié.

Ces défenses spéciales ne sont pas accessibles aux personnes accusées en vertu de l’article 318 et du paragraphe 319(1) du Code.

En vertu des articles 320 et 320.1 du Code, un juge peut, pour des motifs raison-nables, rendre une ordonnance de confiscation de propagande haineuse sous quelque forme que ce soit, y compris les données conservées dans un ordinateur. La propagande haineuse s’entend, au sens du paragraphe 320(8), de tout écrit, signe ou représentation visible qui préconise ou fomente le génocide, ou dont la communication par toute personne constitue une infraction aux termes de l’arti-cle 319. Il est implicite que ce matériel doit cibler des groupes identifiables. Il suffit de démontrer qu’il s’agit de propagande haineuse pour qu’il soit saisi – sans avoir à démontrer qu’il est dangereux. Il faut obtenir le consentement du procureur général de la province avant d’appliquer les dispositions sur la saisie et la confiscation.
5 La liberté d’expression et la Loi canadienne sur les droits de la personne

La LCDP n’énonce pas expressément de droits comme le fait la Charte ni ne prévoit d’interdictions comme le fait le Code. En fait, elle précise à l’article 13, et dans une moindre mesure à l’article 12 (voir plus bas), que certains comportements constituent des « actes discriminatoires », qui peuvent faire l’objet d’une plainte devant la CCDP et que quiconque est reconnu coupable d’un acte discriminatoire peut, en vertu d’une ordonnance, devoir prendre des mesures de réparation.

Depuis son adoption en 1977, le LCDP dispose que l’utilisation de services téléphoniques pour fomenter la haine au Canada constitue un acte discriminatoire. L’article 13 a été adopté à l’origine pour lutter contre l’utilisation de lignes télépho-niques aux fins de diffusion de messages haineux : en effet, des sympathisants néo-nazis distribuaient dans la rue des numéros de téléphone donnant accès à des services téléphoniques qui diffusaient automatiquement des messages racistes préenregistrés. La disposition a été invoquée avec succès par la CCDP et le TCDP pour mettre un terme à ces lignes téléphoniques dans les années 1980 et 199021. Internet étant devenu un moyen privilégié de fomenter la haine, cette disposition a aussi permis d’obtenir gain de cause contre des sites Internet diffusant de la propagande haineuse et leurs exploitants.

Comme cela a été mentionné précédemment, les grandes lignes du mandat de la CCDP aux termes de la LCDP est de tenter de régler, en faisant enquête à leur sujet, les plaintes pour discrimination dans le contexte de l’emploi et de la prestation de services relevant de la compétence fédérale22. Par conséquent, la CCDP et le TCDP se penchent sur les plaintes pour discrimination – et non pas précisément sur les libertés fondamentales décrites à l’article 2 de la Charte, à tout le moins en ce qui concerne leurs garanties constitutionnelles ou leur conformité avec la Charte, car ces questions sont du ressort des tribunaux canadiens. Par exemple, dans le cas d’une affaire de discrimination soulevant une question de religion portée devant la CCDP, le droit d’une personne de pratiquer la religion de son choix ou d’avoir des croyances religieuses ne sera pas contesté. Il s’agira, en fait, de déterminer si cette personne a été victime d’un acte discriminatoire fondé sur sa religion ou sur un aspect de ses croyances ou de sa pratique religieuse23.
5.1 L’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne

L’article 13 de la LCDP n’interdit pas expressément les messages haineux, mais il considère comme un acte discriminatoire le fait :
d’utiliser ou de faire utiliser un téléphone […] en recourant ou en faisant recourir aux services d’une entreprise de télécommunication […] pour aborder ou faire aborder des questions susceptibles d’exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l’article 3.

Jusqu’au milieu des années 1990, cette partie de la LCDP était utilisée pour lutter contre la diffusion de messages fomentant la haine par des services téléphoniques24. Un changement est survenu en juillet 1996 lorsque la Commission a reçu sa première plainte contre l’utilisation d’un site Internet servant à diffuser des messages fomentant la haine (essentiellement des documents niant l’Holocauste). (L’article 13 est reproduit intégralement à l’annexe A de la présente publication.)

En décembre 2001, dans le cadre d’une série de mesures anti-terroristes adoptées après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, l’article 13 a été modifié afin de préciser que les messages haineux diffusés sur Internet relevaient de la compétence de la CCDP25. Le paragraphe 13(2) précise maintenant que le paragra-phe 13(1) s’applique aux communications électroniques « notamment d’Internet, ou de tout autre moyen de communication semblable mais qu’il ne s’applique pas dans les cas où les services d’une entreprise de radiodiffusion sont utilisés ». Autrement dit, l’article 13 s’applique désormais aux messages haineux envoyés ou communi-qués par téléphone ou par Internet (ou par un moyen de communication semblable, à l’exclusion de la radiodiffusion).

L’article 13 ne s’applique pas aux documents imprimés, à moins qu’un texte imprimé ait été affiché sur un site Internet, auquel cas il peut relever de la compétence de la CCDP. La Cour suprême du Canada a également souligné que cet article ne vise pas les propos que d’aucuns peuvent trouver offensants, mais uniquement les formes les plus extrêmes d’expression de la haine et du mépris26.

L’article 13 n’a pas pour objet de remplacer le Code ni de substituer à la compétence des tribunaux celles de la CCDP et du TCDP. Comme l’a fait remarquer la CCDP, ces systèmes sont complémentaires et non concurrentiels. Le Code peut être utilisé pour réprimer l’incitation à la haine dans un endroit public ou les messages appelant au génocide, peu importe le mode de communication. En revanche, la LCDP s’applique uniquement à la diffusion répétée de messages haineux au moyen d’une entreprise de télécommunication ou d’un ordinateur. Contrairement aux dispositions du Code susmentionnées, le mis en cause dans une plainte déposée en vertu de l’article 13 de la LCDP ne dispose d’aucun moyen de défense particulier. De même, il n’est pas nécessaire d’obtenir le consentement du procureur général pour instruire une plainte pour discrimination – tout le monde peut déposer ce genre de plainte. En outre, le plaignant n’a pas à faire la preuve d’une intention ou d’une volonté précise de la part du mis en cause.
5.1.1 Autres mesures législatives contenant des dispositions analogues

Différentes formes de discours haineux sont interdites par d’autres lois fédérales. Ainsi, l’article 8 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion interdit la radiodiffusion :
des propos offensants ou des images offensantes qui, pris dans leur contexte, risquent d’exposer une personne, un groupe ou une classe de personnes à la haine ou au mépris pour des motifs fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’orientation sexuelle, l’âge ou une déficience physique ou mentale27.

D’autres règlements pris en vertu de la Loi sur la radiodiffusion renferment des dispositions analogues28. En outre, la Loi sur les douanes et le Tarif des douanes29interdisent l’importation de propagande haineuse.

Chaque province et territoire du Canada a adopté une loi sur les droits de la personne qui interdit ou limite les activités discriminatoires30. À l’exception de la Human Rights Act du Yukon, ces lois contiennent une disposition semblable à l’article 12 de la LCDP qui interdit certaines formes d’affichage, de diffusion ou de publication de messages annonçant l’intention de commettre un acte discrimina-toire ou incitant autrui à en commettre un en se fondant sur des motifs de distinction illicite31. L’objet initial de ces lois était d’interdire les types d’affiches utilisées au Canada par certains commerces ou entreprises pour indiquer qu’ils ne serviraient pas les membres de certains groupes raciaux ou ethniques32. La Commission ontarienne des droits de la personne précise que ces lois :
autorisent les organismes de défense des droits de la personne à se servir des pouvoirs d’exécution pour contester la publication de l’intention de refuser un logement, un emploi ou des services, comme l’accès à un restaurant ou à un magasin, en raison de la race ou de la religion d’une personne ou d’un autre motif énuméré33.

Les lois de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan et des Territoires du Nord-Ouest interdisent également la promotion de messages haineux ou méprisants. Ces interdictions couvrent différents types de messages, qu’ils soient affichés, publiés ou diffusés. Elles diffèrent de l’interdiction prévue à l’article 13 de la LCDP, qui se limite aux télécommunications par téléphone et par ordinateur (et autres moyens de communication semblables).

Les dispositions antidiscriminatoires et anti-haine que renferment les lois sur les droits de la personne de l’Alberta, de la Saskatchewan, de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve-et-Labrador indiquent toutes explicitement qu’elles ne visent en rien à entraver ou à limiter la liberté d’expression. Les tribunaux ont souligné que cette référence à la liberté d’expression dans les lois de l’Alberta et de la Saskatchewan sur les droits de la personne obligeait à concilier l’objectif d’éliminer la discrimination et la nécessité de protéger la libre expression34.

L’interprétation que font les tribunaux canadiens des dispositions antidiscriminatoires et anti-haine révèle que, malgré leurs différents libellés, ces dispositions poursuivent dans une large mesure des objectifs similaires35. En dépit de certaines différences factuelles, l’accent mis sur l’examen du message et l’importance accordée à la liberté d’expression ont été passablement bien établis dans la jurisprudence. Les lois diffèrent l’une de l’autre – de même que l’interprétation qui en est faite – quant au type de message et de pratique discriminatoire visé, au fait qu’elles visent ou non la haine et le mépris et au fait qu’elles obligent ou non à tenir compte de l’intention de l’auteur du message.
5.1.2 Constitutionnalité de l’article 13

L’article 13 a déjà été contesté devant le TCDP et les tribunaux canadiens au motif qu’il contrevient à la liberté d’expression garantie à l’alinéa 2b) de la Charte. La décision clé de la Cour suprême du Canada portant sur la constitutionnalité de l’article 13, l’arrêt Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Taylor (« l’arrêt Taylor»)36, mettait en cause John Ross Taylor et le Western Guard Party qui, à l’époque, exploitaient un service de messagerie téléphonique fomentant la haine. Même si la Cour a jugé que l’article 13 violait l’alinéa 2b) de la Charte, elle l’a sauvegardé en vertu de l’article premier comme limite raisonnable imposée à la liberté d’expression dans une société libre et démocratique. Le fait que ces dispositions existent dans un contexte législatif des droits de la personne réparateur, plutôt que dans le cadre du droit criminel, ne nuit pas à l’acceptabilité constitutionnelle de l’article 13.

La Cour suprême a conclu, dans l’arrêt Taylor, que la propagande haineuse posait une menace grave pour la société et que : « Puisqu’il s’agit d’une tentative de prévenir les préjudices découlant de la propagande haineuse, l’objet que vise le par. 13(1) est de toute évidence suffisamment urgent et réel pour justifier certaines restrictions à la liberté d’expression ». La Cour a statué que la propagande haineuse apportait peu aux aspirations inscrites à l’alinéa 2b) de la Charte, que ce soit dans la recherche de la vérité, la protection de la démocratie ou l’épanouissement personnel. Elle a reconnu en outre que l’égalité et le multiculturalisme, valeurs dont traitent les articles 15 et 27 de laCharte, « servent à mettre en relief l’importance de l’objectif visé par le législateur fédéral quand il a adopté le par. 13(1) ». Autrement dit, le respect de la dignité et de l’égalité des personnes, surtout en tant que membres d’un groupe particulier, justifie la restriction de la liberté d’expression. On a utilisé un raisonnement similaire dans l’affaire R. c. Keegstra, où l’on examine la constitutionnalité des restrictions à la liberté de parole prévues dans le Code, en précisant que « l’objectif du Parlement est appuyé non seulement par les travaux de nombreux groupes d’étude, mais aussi par notre connaissance historique collective des effets potentiellement catastrophiques de la fomentation de la haine37 ».

La décision la plus connue du TCDP en ce qui concerne la diffusion de propos haineux sur Internet est celle portant sur un site tenu par Ernst Zundel, militant de la liberté d’expression accusé à plusieurs reprises de diffuser des textes antisémites38. Cette décision a clarifié l’applicabilité de l’article 13 à Internet et en a confirmé la constitutionnalité. Par la suite, le Parlement a modifié l’article 13 pour qu’il s’applique également aux communications par Internet. Le TCDP a ensuite invoqué et appliqué la décision Zundel dans d’autres décisions qu’il a rendues sur la fomentation de la haine sur Internet39.

En 2009, dans l’arrêt Warman c. Lemire40, le TCDP a soutenu que l’article 13, examiné conjointement avec d’autres types d’ordonnances réparatrices pouvant être prises relativement à cet article en vertu de l’article 54 de la LCDP, entraînait une violation déraisonnable à l’alinéa 2b) de la Charte. Le TCDP a examiné l’arrêt Taylor, mais a conclu que les sanctions prévues par la LCDP41, qui ont été ajoutées à la suite de la décision, changeaient la nature de l’analyse constitutionnelle en cause.

Dans l’arrêt Taylor, la Cour suprême du Canada avait constaté, entre autres, qu’en raison de la nature conciliatoire de la procédure de traitement des plaintes relatives aux droits de la personne, l’article 13 portait très peu atteinte à la liberté de parole. En revanche, dans Warman c. Lemire, le TCDP était d’avis que les efforts de conciliation prévus par la CHRA n’avaient pas été déployés dans le traitement des plaintes déposées aux termes de cet article. Il a également conclu que l’ajout de dispositions prévoyant des sanctions pourrait être perçu comme « dissuasif » en ce qui a trait à la liberté de parole42. À la suite de ces changements, il a pu réexaminer la décision rendue dans l’arrêtTaylor pour conclure que l’atteinte portée à la liberté de parole en vertu de l’article 13 n’était plus minime, puisque cette disposition était devenue « davantage à caractère pénal43 ». Estimant ne pas être habilité à invalider l’article 13, le TCDP ne l’a donc pas appliqué en l’espèce ni rendu d’ordonnance de réparation.

La CCDP a présenté devant la Cour fédérale du Canada une demande de contrôle judiciaire de cette décision44. En 2012, la Cour fédérale a statué que le TCDP avait eu raison de ne pas appliquer les dispositions relatives aux sanctions et de déclarer qu’elles étaient inopérantes, mais qu’il avait commis une erreur de droit en n’appli-quant pas l’article 13. Comme pour l’arrêt Taylor, la Cour a conclu que les avantages de l’article 13 l’emportaient sur ses répercussions sur la liberté d’expression. La cause a été renvoyée au TCDP pour qu’il déclare que le message de M. Lemire (qui constituait l’objet de la plainte) contrevenait à l’article 13 et pour qu’il envisage de rendre une ordonnance de réparation en vertu des alinéas 54(1)a) ou b) de la LCDP.

Plus récemment, dans l’affaire Saskatchewan (Human Rights Commission) c. Whatcott45, la Cour suprême du Canada s’est penchée sur la constitutionnalité de l’alinéa 14b) du Saskatchewan Human Rights Code, disposition semblable à l’article 13 de la LCDP en ceci qu’elle interdit tout message ou publication qui « expose ou tend à exposer, une personne ou un groupe de personnes à la haine, au ridicule, au dénigrement, ou porte atteinte à leur dignité, pour des motifs illicites de distinction »46. La Cour a suivi la décision qu’elle avait rendue dans l’arrêt Taylor et confirmé que l’interdiction de promouvoir la haine constituait une limite raisonnable à la liberté d’expression. Elle a examiné les dispositions législatives relatives aux propos haineux et les critères que les tribunaux devraient appliquer en pareils cas. Elle a souligné qu’en raison de leur tendance à réduire au silence les groupes ciblés, les discours haineux pouvaient fausser ou limiter l’échange libre et dynamique d’idées et nuisaient ainsi aux valeurs qui sous-tendent la liberté de parole. Cependant, comme seuls les discours « virulents et extrêmes » devraient être compris dans la définition de « haineux », la Cour a statué que la partie de la LCDP sur les discours dénigrant une personne ou portant atteinte à sa dignité était inconstitutionnelle et l’a abolie. Dans ses motifs, la Cour a conclu que les propos de ce genre n’étaient pas assez extrêmes pour justifier que l’on limite la liberté d’expression.
5.1.3 Demandes de révision de l’article 13

Un nombre grandissant de Canadiens et d’organismes réclament l’abrogation de l’article 13. D’autres demandent aux législateurs de préserver les principes qui sous-tendent cette disposition, en concédant cependant qu’il y aurait peut-être lieu de la modifier. Le débat est souvent enflammé, car il concerne des sujets aussi délicats que le racisme et la liberté de parole. Les partisans de l’abrogation ou de la révision de l’article 13 regroupent non seulement des personnes qui ont comparu devant le TCDP en tant que défendeurs, mais aussi des universitaires, des politiciens, des défenseurs de la liberté de parole et des journalistes47. En janvier 2008, le député fédéral libéral Keith Martin a déposé une motion d’initiative privée demandant au Parlement d’abroger l’article 13, mais la motion a été rejetée48. Il convient de noter que même si l’article 13 est abrogé ou modifié, les dispositions du Code sur la propagande haineuse continueront de s’appliquer comme avant : le consentement du procureur général restera nécessaire et les personnes accusées devront subir un procès pénal avant que l’on puisse les déclarer coupables d’avoir fomenté la haine.

Les partisans de l’abrogation de l’article 13 avancent habituellement les deux arguments suivants; ils font remarquer que les tribunaux criminels sont mieux outillés pour poursuivre les auteurs de crimes haineux et de propagande haineuse, sans doute parce que les juges sont mieux formés pour instruire des affaires concernant les droits garantis par la Charte ou que ces tribunaux protègent mieux les personnes accusées; ils affirment également que les restrictions à la liberté d’expression devraient être réduites au minimum, voire entièrement supprimées, puisqu’ils sont d’avis que la meilleure façon de réagir à des formes d’expression « répréhensibles », comme les discours haineux, est de les ignorer ou d’y répondre par de meilleurs arguments.

Par contre, un certain nombre d’organisations s’opposent ouvertement à l’abrogation de l’ensemble de l’article 13 (sans toutefois s’opposer nécessairement à sa révision), en soutenant qu’il est crucial de protéger les communautés minoritaires contre les préjudices que peuvent causer des propos haineux, comme l’incitation à une haine redoublée, l’incitation à la violence et l’atteinte à la dignité humaine élémentaire49.

Selon la CCDP, l’article 13, qui « a toujours été controversé », donne lieu à un débat particulièrement vigoureux depuis 2007, année où une plainte a été déposée contre un « magazine d’actualités grand public », – plainte ensuite rejetée, cependant50. Il s’agissait de l’affaire Congrès islamique canadien (CIC) c. Rogers Communications, dans laquelle le CIC avait déposé une plainte en vertu de l’article 13, alléguant qu’un texte de Mark Steyn publié dans la version Web du magazine Maclean’s exposait les membres de la communauté musulmane à la haine et au mépris51. Cet article avançait, en s’appuyant sur des données démographiques, que le « monde occidental » risquait d’être supplanté par le « monde musulman »52. La CCDP :
a analysé la plainte, comme l’exige la loi. Elle a établi que certains passages de l’article de M. Steyn étaient formulés dans des termes forts, colorés, choisis pour provoquer les discussions et susceptibles de nourrir la polémique, mais qu’ils ne dépassaient pas la limite fixée par la Cour suprême [dans l’arrêt Taylor] concernant la haine et le mépris53.

La plainte a également été rejetée par la Commission ontarienne des droits de la personne pour cause de défaut de compétence et par le Tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique après instruction. Au sujet de son propre mandat, la CCDP estime avoir :
rempli le mandat que lui confère la loi puisqu’elle a reçu et traité la plainte, puis a rendu sa décision. Toutefois, de nombreuses personnes qui avaient une perception erronée du rôle de la Commission ont critiqué cette dernière pour le simple fait d’avoir accepté la plainte au départ54.

En mai 2009, McClelland & Steward publie Shakedown : How Our Government Is Undermining Democracy in the Name of Human Rights de l’avocat et journaliste Ezra Levant, qui avait écrit au sujet de son expérience alors qu’il avait fait l’objet d’une plainte pour incitation à la haine devant la Commission des droits de la personne de l’Alberta pour avoir publié de nouveau les caricatures controversées du prophète Mahomet55. Le livre a attiré une attention considérable sur la question de la révision de l’article 13. Quelques mois après sa publication, il figurait parmi les grands succès de librairie du pays56. Le point de vue de la critique a été partagé : alors que certains, dont des critiques rattachés aux grandes publications d’information, en ont fait l’éloge et qualifié Levant de grand défenseur des libertés fondamentales57, d’autres ont critiqué ses méthodes de recherche, plus particulièrement ses sources d’information sélectives ou la présentation tendancieuse de ses conclusions (sans toutefois s’opposer nécessairement à la révision)58.

Dans son ouvrage, Levant expose ce qu’il considère comme des problèmes graves posés par les commissions des droits de la personne, que ce soit leur méthodologie, leur éthique ou leur raison d’être. Il soutient que ces commissions ont été créées en réaction à un contexte social révolu, où le problème de la discrimination prenait une forme différente. En ce qui concerne les messages haineux, il préconise l’élimination de toute restriction à la liberté de parole, soutenant que la meilleure façon de régler le problème de la propagande haineuse néo-nazie est de l’ignorer. Selon lui, les lois sur les droits de la personne qui limitent la liberté de parole empiètent inutilement sur un droit fondamental. Enfin, il s’oppose au modèle institutionnel de protection des droits de la personne en vigueur au Canada.
5.1.4 Rapports de la Commission canadienne des droits de la personne concernant l’article 13

La CCDP a publié, en 2008 et 2009, deux rapports concernant l’article 13. Rédigé par Richard Moon, professeur de droit canadien, le premier rapport s’intitule Rapport présenté à la Commission canadienne des droits de la personne concernant l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne et la réglementation de la propagande haineuse sur Internet59. Intitulé Liberté d’expression et droit à la protection contre la haine à l’ère de l’Internet, le second est un rapport spécial que la CCDP a présenté au Parlement concernant le débat au sujet de l’article 1360.
5.1.4.1 Le rapport Moon

Le rapport de Richard Moon a beaucoup retenu l’attention des médias au moment de sa publication, en grande partie en raison de sa recommandation d’abroger l’article 13. Plusieurs de ses recommandations portent sur le « rôle d’intervenants non gouvernementaux dans la prévention des formes d’expression de nature haineuse ou discriminatoire61 ».

Le rapport Moon recommande principalement « d’abroger l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, de sorte que la Commission et le Tribunal canadien des droits de la personne n’aient plus à traiter de propagande haineuse, notamment celle sur Internet ». Le rapport précise également ce qui suit :
La propagande haineuse doit continuer d’être interdite en vertu du Code criminel, mais cette interdiction doit se limiter aux formes d’expression qui préconisent ou justifient la violence, ou qui contiennent des menaces de violence. Dans leur lutte contre les propos haineux sur Internet, la police et les poursuivants doivent recourir davantage à l’article 320.1 du Code criminel, qui confère au juge le pouvoir d’ordonner à un fournisseur d’accès Internet de retirer la « propagande haineuse » de son ordinateur. Chaque province devrait mettre sur pied une « équipe anti-haine » composée de policiers et de procureurs généraux expérimentés pour s’occuper des enquêtes et des poursuites relatives aux crimes haineux, y compris la propagande haineuse, en appliquant le Code criminel62.

Le rapport Moon présente aussi des recommandations à prendre en considération dans le cas où le Parlement décidait de ne pas abroger l’article 13 de la LCDP. Ces recommandations, qui visent à modifier l’article 13 « afin qu[’il] ressemble davantage à une interdiction criminelle de la propagande haineuse », comprennent ce qui suit :
modifier le libellé du paragraphe 13(1) pour préciser que l’interdiction vise seulement les formes d’expression discriminatoire les plus extrêmes renfermant des menaces ou préconisant ou justifiant la violence contre les membres d’un groupe identifiable;
modifier le paragraphe 13(1) de la LCDP pour y ajouter la notion d’intention;
modifier la LCDP afin de créer une procédure distincte pour les enquêtes de la CCDP relatives aux plaintes déposées en vertu de l’article 13. La CCDP recevrait des demandes de renseignements et de l’information de la part de particuliers ou d’associations communautaires, mais elle ne procéderait plus aux évaluations et aux enquêtes relatives aux plaintes formelles;
que la Commission ait le droit exclusif d’amorcer une enquête dans les cas relevant de l’article 13. Si, à la suite d’une enquête, la CCDP recommande de renvoyer l’affaire devant le TCDP, il lui incombera d’en saisir ce dernier63.

Ces changements auraient entre autres conséquences de faire en sorte que le plaignant ne soit plus au cœur de la procédure, comme c’est actuellement le cas. Selon Moon, cela permettrait à la CCDP de décider dès les premières étapes du processus d’enquête si certaines plaintes ont des chances d’aboutir devant le TCDP.
5.1.4.2 Le rapport spécial de la Commission canadienne des droits de la personne au Parlement

Le rapport spécial de la CCDP au Parlement intitulé Liberté d’expression et droit à la protection contre la haine à l’ère d’Internet précise d’emblée qu’il entend présenter « une analyse exhaustive d’un débat d’actualité », ce qu’il conçoit comme « le meilleur moyen de prévenir les préjudices causés par la propagande haineuse sur Internet, tout en respectant la liberté d’expression64 ». Le rapport examine les dispositions juridiques pertinentes du Code, de la LCDP et même du droit interna-tional; il décrit brièvement les procédures suivies par la CCDP en cas de propagande haineuse diffusée sur Internet; il fournit des exemples de propagande haineuse ayant fait l’objet d’une enquête et ayant été instruits par le TCDP; il formule ses observations au sujet du rôle de la société civile et des organismes gouvernementaux en ce qui concerne la propagande haineuse; il présente des recommandations à l’intention du Parlement.

La CCDP conclut que le Code et la LCDP poursuivent un objectif valable en s’attaquant aux messages haineux sur Internet. Elle n’est donc pas favorable à l’abrogation intégrale de l’article 13, mais propose un certain nombre de changements. Elle recommande ainsi au Parlement :
d’ajouter une définition des termes « haine » et « mépris » conforme à celle utilisée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Taylor (c.-à-d. – comme le propose le rapport Moon – qui ne limite pas la définition de message haineux aux formes d’expression qui préconisent ou justifient la violence ou qui contiennent des menaces);
d’autoriser l’attribution des dépens dans des circonstances exceptionnelles, si le TCDP considère qu’une partie a abusé de son processus;
d’ajouter une disposition à l’article 41 de la LCDP pour permettre de rejeter sans tarder les plaintes déposées en vertu de l’article 13 si la propagande en cause ne correspond pas à la stricte définition des termes « haine » et « mépris »;
d’abroger l’alinéa 54(1)c), disposition en vertu de laquelle des sanctions pécuniaires peuvent être infligées pour violation de l’article 13;
d’examiner l’exigence du Code d’obtenir le consentement du procureur général, qui constitue peut-être un obstacle pour certaines poursuites;
d’examiner, de concert avec les organes compétents des provinces et territoires, les avantages d’une meilleure coordination des efforts déployés par les procureurs de la Couronne et les services de police pour protéger les Canadiens contre la propagande haineuse.

Pour corroborer ses recommandations, la CCDP formule le point de vue selon lequel la haine, les préjugés et la discrimination restent des problèmes importants au Canada, qui méritent toujours d’être visés par la LCDP et le Code. Elle affirme plus précisément que tous les citoyens ont le droit d’être traités avec équité, dignité et respect et d’être protégés contre les préjudices que peut causer la propagande haineuse.
5.1.4.3 Projet de loi C-304

Le projet de loi C-304 : Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne (protection des libertés) a été déposé à la Chambre des communes par le député Brian Storseth le 30 septembre 2011. Au moment de la rédaction de la présente publication, il avait franchi l’étape de la deuxième lecture au Sénat.

Bien que son objet principal est d’abroger l’article 13, cette mesure législative abrogerait ou modifierait aussi d’autres dispositions de la LCDP visant l’application de l’article 13, notamment le paragraphe 54(1), qui limite le type d’ordonnance que peut rendre le TCDP dans les affaires relatives à l’article 13 et établit les facteurs qu’il doit prendre en considération pour ce faire. Comme il l’a expliqué devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes lors de l’étude du projet de loi en avril 2012, M. Storseth est préoccupé, entre autres, par le passage suivant de l’article 13 : « [d]es questions susceptibles d’exposer à la haine ou au mépris des personnes » :
Cela veut dire en fait qu’il suffit que la Commission canadienne des droits de la personne et le Tribunal canadien des droits de la personne estiment que vous avez probablement blessé quelqu’un […] la vérité n’est pas un moyen de défense. L’intention n’est pas un moyen de défense. Vous perdez le droit à l’équité procédurale, le droit à un procès dans des délais raisonnables, et le droit aux services d’un avocat. Il est alarmant de constater que, jusqu’à tout récemment, le Tribunal des droits de la personne avait un taux de condamnation de 100 %, et que 90 % des accusés n’étant pas représentés par un avocat, parce qu’ils ne pouvaient simplement pas se payer leurs services. Parallèlement, les honoraires judiciaires des plaignants sont intégralement couverts […] Cela illustre clairement comment la censure peut dépasser les bornes parce qu’il y a une bureaucratie trop zélée65.

Après avoir étudié le projet de loi, le Comité a présenté son rapport renfermant des amendements mineurs66. Pendant les audiences du Comité, des membres des partis de l’opposition et plusieurs témoins se sont prononcés pour le maintien de l’article 13. Parmi eux se trouvait l’Association du Barreau canadien, qui s’est également montré en faveur de l’abolition des sanctions prévues à l’article 54 en raison de leur incompatibilité « avec la fonction réparatrice fondamentale qui est celle de la loi relative aux droits de la personne67 ». B’nai Brith, qui avait milité activement en faveur du maintien de l’article 13 dans le passé, a recommandé son abrogation. Frank Dimant, vice président exécutif de l’organisme, a déclaré au Comité :
B’nai Brith Canada s’est servi au fil des ans de l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne comme moyen pour combattre l’expression haineuse […] Toutefois, comme organisation progressiste de défense des droits de la personne, nous reconnaissons que cet article est souvent utilisé à tort et cause beaucoup de difficultés à différentes personnes. Par conséquent, nous appuyons pour le moment l’abrogation de l’article 13.

Je tiens à vous dire clairement que ce n’est pas de gaieté de cœur que nous en sommes venus à cette décision […] Toutefois […] à moins de mettre en place d’autres mesures de protection, cette abrogation nuira à la lutte de la population canadienne contre ceux qui incitent à la haine68.
5.2 L’article 12 de la Loi canadienne sur les droits de la personne

Aux termes de l’article 12 de la LCDP, « constitue un acte d iscriminatoire le fait de publier ou d’exposer en public […] des affiches, des écriteaux, des insignes, des emblèmes, des symboles ou autres représentations qui […] expriment ou suggèrent des actes discriminatoires […] en encouragent ou visent à en encourager l’accom-plissement » à l’encontre d’un groupe identifiable. Cette disposition précise, en outre, que les actes discriminatoires exprimés ou suggérés doivent l’être « au sens des articles 5 à 11 ou de l’article 14 ». Autrement dit, l’article 12 ne crée pas de nouveaux actes discriminatoires en tant que tels. Il ajoute simplement l’interdiction de publier ou d’exposer toute représentation qui exprime ou suggère l’intention de commettre un acte discriminatoire ou qui encourage autrui à en commettre un d’une façon déjà énoncée ailleurs dans la LCDP. (L’article 12 est reproduit intégralement à l’annexe A de la présente publication.)

L’article 12 rejoint en quelque sorte l’article 13 du fait que l’alinéa b) concerne les représentations qui « encouragent » autrui à commettre des actes discriminatoires, c’est-à-dire les représentations qui diffusent un message visant à convaincre d’autres personnes d’agir de manière discriminatoire. Il est donc possible de comparer cet aspect de l’alinéa b) aux dispositions de l’article 13 relatives à la propa-gande haineuse. Si l’article 12 devait être modifié pour des motifs semblables aux arguments avancés pour abroger l’article 13 (comme ceux de Richard Moon et des partisans de la liberté d’expression), alors l’alinéa b) serait probablement au cœur de toute proposition de modification.

Le rapport Moon souligne que :
[d]ans les ressorts qui n’ont pas de disposition semblable à l’article 13 dans leur code, on a parfois donné une interprétation large à la disposition visant les affiches discriminatoires pour considérer qu’elle s’appliquait aux propos discriminatoires apparaissant sur des affiches, et dans certaines provinces, aux propos apparaissant dans des publications69.

Par conséquent, dans les provinces où les lois en vigueur ne renferment pas d’équivalent à l’article 13, l’article 12 est utilisé à des fins analogues70. À ce sujet, le rapport Moon indique ce qui suit : « Si l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne est abrogé, il peut être nécessaire de modifier ou d’abroger aussi l’article 12 pour qu’il ne prenne pas la place de l’article 1371 ».

Le rapport Moon ne renferme aucune autre précision au sujet de la façon de procé-der pour modifier l’article 12. Quant au rapport spécial de la CCDP au Parlement, il ne mentionne pas l’article 12. D’ailleurs, les juristes ou les observateurs de la scène juridique, les médias, les tribunaux ou le TCDP n’accordent pas à l’article 12 la même attention qu’à l’article 13. Il n’en demeure pas moins que toute proposition d’abrogation et de modification de l’article 12 nécessiterait une analyse spécifique, étant donné que cette disposition diffère en plusieurs points de l’article 13. Si l’on abrogeait l’article 12, les actes discriminatoires visés aux articles 5 à 11 ou à l’article 14 continueraient d’être interdits par la LCDP. Ce qui serait perdu, c’est l’intention manifeste de la LCDP de considérer comme acte discriminatoire le fait de publier ou d’exposer toute représentation exprimant l’intention de commettre un acte discriminatoire ou encourageant autrui à le faire. Toutefois, si l’objet initial de l’article devait être maintenu (c.-à-d. s’occuper de situations où des pancartes placées dans des établissements signalent une intention d’agir de façon discriminatoire à l’encontre de membres de certains groupes identifiables), l’article 12 devrait être modifié plutôt qu’abrogé.

Enfin, dans l’affaire Dreaver et al. c. Pankiw72, le TCDP a instruit une plainte déposée contre un député fédéral qui avait distribué dans sa circonscription une série de brochures imprimées contenant des déclarations sur les Autochtones dans le contexte du système de justice pénale et des activités gouvernementales. Les plaignants alléguaient que la distribution des brochures constituait un acte discriminatoire fondé sur la race dans la prestation de services publics et que les déclarations en question exprimaient une discrimination ou encourageaient à la discrimination. En ce qui concerne l’article 12, le TCDP a conclu que les déclarations faites dans ces brochures ne constituaient pas une « représentation » au sens de cette disposition. Il a aussi conclu que le mot « représentation » devait renvoyer à une image, à un portrait ou à une reproduction et ne pouvait pas s’appliquer à des déclarations ou à des textes. Autrement dit, la brochure ne correspond pas à la définition de « représentation » au sens de l’article 12 (qui ne s’appliquait donc pas dans cette affaire). Il ne semble pas y avoir eu d’autres décisions rendues à l’issue de plaintes déposées en vertu de l’article 12.
6 Conclusion

L’adoption du projet de loi C-304 mettrait fin au mandat actuel de la CCDP et du TCDP, qui est de lutter contre la propagande haineuse sur Internet. Les données publiées par Statistique Canada selon lesquelles les crimes haineux déclarés par la police sont en hausse depuis quelques années (malgré un léger recul en 2012)73 ne sont qu’un des indices prouvant la nécessité de poursuivre la lutte contre la haine au Canada. Le débat sur les moyens à prendre pour limiter les discours haineux et protéger les groupes vulnérables n’est pas prêt d’être terminé. Avec la suppression de l’article 13, il se concentrera probablement sur la capacité du Code et des lois antidiscriminatoires et anti-haine de s’attaquer de manière efficace à cette problématique.
Notes

†  Les études générales de la Bibliothèque du Parlement sont des analyses approfondies de questions stratégiques. Elles présentent notamment le contexte historique, des informations à jour et des références, et abordent souvent les questions avant même qu’elles deviennent actuelles. Les études générales sont préparées par le Service d’information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque, qui effectue des recherches et fournit des informations et des analyses aux parlementaires ainsi qu’aux comités du Sénat et de la Chambre des communes et aux associations parlementaires, et ce, de façon objective et impartiale. [ Retour au texte ]

Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11.[ Retour au texte ]
Code criminel (le Code), L.R.C. 1985, ch. C-46. [ Retour au texte ]
Renvoi relatif à l’art. 193 et à l’al. 1951(1)c) du Code criminel (Man.), [1990] 1 R.C.S. 1123, par. 79 et 80. Le juge Lamer a relevé dans le Code 25 infractions qui imposent une certaine forme de restriction à la liberté d’expression. [ Retour au texte ]
Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6. [ Retour au texte ]
Canada (Commission des droits de la personne) c. Taylor , [1990] 3 R.C.S. 892. [ Retour au texte ]
Projet de loi C-304 : Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne (protection des libertés), 1re session, 41e législature. [ Retour au texte ]
Voir aussi : Nancy Holmes, Les lois sur les droits de la personne au Canada et la charge : guide comparatif (MR102f), publication no MR-102F, Ottawa, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 18 septembre 1997. [ Retour au texte ]
En vertu de l’art. 92 de la Loi constitutionnelle de 1867, les provinces ont compétence pour légiférer dans le domaine de « la propriété et des droits civils », des licences de « boutiques » et autres licences et « [g]énéralement toutes les matières d’une nature purement locale ou privée dans la province ». Ces pouvoirs autorisent une province à adopter des lois sur les droits de la personne pour toute question concernant la prestation de services, l’emploi et l’hébergement dans la province. Par conséquent, ces lois régissent, entre autres, les entreprises enregistrées ou constituées en société dans une province; les propriétaires; les fonctionnaires, organismes ou autres organisations provinciaux; les employeurs; les fournisseurs de services en général.
En vertu de l’art. 91, les lois fédérales peuvent s’appliquer à l’égard de la « réglementation du trafic et du commerce » ou, de façon générale, pour promouvoir « la paix, l’ordre et le bon gouvernement ». Par conséquent, la Loi canadienne sur les droits de la personne est applicable à l’emploi, à l’hébergement et aux services fournis par le gouvernement fédéral et s’étend aux sociétés et aux autres personnes ou institutions assujetties à la réglementation fédérale. [ Retour au texte ]
Les lois traitant de questions relatives aux droits de la personne, à un degré plus ou moins élevé, incluent la Loi sur l’équité en matière d’emploi, L.C. 1995, ch. 44 et laLoi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, L.C. 2000, ch. 24. [ Retour au texte ]
Les entreprises assujetties à la réglementation fédérale comprennent les sociétés d’État, les ministères et les organismes fédéraux, la Société canadienne des postes, les banques à charte, les compagnies aériennes nationales, les compagnies de télécommunication et de téléphone interprovinciales; les compagnies de transport interprovinciales et d’autres industries sous réglementation fédérale telles que certaines compagnies minières. [ Retour au texte ]
L’art. 1 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) « garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique. » [ Retour au texte ]
Dans certaines affaires, les tribunaux ont accordé au gouvernement le temps nécessaire pour corriger un élément d’une loi jugé inconstitutionnel avant que n’entre en vigueur la décision de déclarer invalide la loi en question. [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Vriend c. Alberta, [1998] 1 R.C.S. 493 et Egan c. Canada, [1995] 2 R.C.S. 513. [ Retour au texte ]
Déclaration canadienne des droits, L.C. 1960, ch. 44. [ Retour au texte ]
Peter Hogg, Constitutional Law of Canada, 5e éd., Toronto, Thomson Carswell, 2009, p. 43 à 7 à 43 à 10. [TRADUCTION] [ Retour au texte ]
Loi électorale du Canada, L.C. 2000, ch. 9, art. 328. [ Retour au texte ]
On a proposé à de multiples reprises depuis leur adoption de modifier les dispositions sur la propagande haineuse, mais le Parlement ne les a modifiées que deux fois. Il l’a fait en adoptant la Loi antiterroriste (L.C. 2001, ch. 41), dont l’art. 10 a modifié le Code par adjonction de l’art. 320.1, portant sur le matériel informatique et sa saisie. Le Parlement a aussi modifié les dispositions sur la propagande haineuse en adoptant la Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse) (L.C. 2004, ch. 14), qui élargit la définition de « groupe identifiable » à toute section du public qui se différencie des autres par l’orientation sexuelle. [ Retour au texte ]
Pour en savoir plus, voir : Philip Rosen, La propagande haineuse, publication no 85 6F, Ottawa, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 24 janvier 2000. Pour une description des incidents survenus dans les années 1960 qui ont amené le Parlement à adopter les dispositions relatives à la propagande haineuse qui se trouvent dans le Code, voir : William Kaplan, « Maxwell Cohen and the Report of the Special Committee on Hate Propaganda », dans William Kaplan et Donald McRae (dir.), Law, Policy, and International Justice: Essays in Honour of Maxwell Cohen, Montréal et Kingston, McGill Queen’s University Press, 1993. [ Retour au texte ]
Outre ces crimes haineux précis, la haine est une circonstance aggravante dans la détermination de la peine à infliger dans tout type d’infraction criminelle (sous al. 718.2a)(i) du Code). [ Retour au texte ]
L’art. 7 du projet de loi C-46 : Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la concurrence et la Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle (déposé en juin 2009 à la Chambre des communes par l’honorable Robert Nicholson, ministre de la Justice et procureur général du Canada) modifierait la définition de « communiquer » au par. 319(7) du Code, qui deviendrait : « ”communiquer” Le fait de communiquer par tout moyen, notamment le fait de rendre accessible. » Le terme « communiquer » aurait pris alors un sens très large pour comprendre tous les types de communication. De même, aurait été visé par cette disposition et s’exposerait à des accusations quiconque rend accessibles des renseignements ainsi communiqués en reproduisant p. ex. un article dans un magazine ou en propageant des messages haineux sur Internet s’exposerait à des accusations. Le projet de loi C-46 est mort au Feuilleton. [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Smith et Lodge c. Western Guard Party (juge Taylor) (1979), Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP), T.D. 1/79. [ Retour au texte ]
La Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) a d’autres responsabilités qui sont énoncées dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi, L.C. 1995, ch. 44. Voir : CCDP, Aperçu. [ Retour au texte ]
La CCDP et le TCDP doivent parfois concilier les besoins du fournisseur de services ou de l’employeur et ceux du bénéficiaire des services ou des employés. En matière d’emploi, par exemple, il est possible d’invoquer des exigences professionnelles justifiées pour défendre une pratique jugée discriminatoire dans d’autres circonstances. Ainsi, l’employé qui accomplit un travail manuel doit pouvoir se déplacer librement sans l’utilisation d’aides. Dans ce genre de situation, l’employeur peutavoir le droit de ne pas embaucher quelqu’un qui n’est pas en mesure d’exécuter les tâches manuelles requises. [ Retour au texte ]
Pour plus de détails au sujet de l’historique de l’art. 13, voir : Richard Moon, Rapport présenté à la Commission canadienne des droits de la personne concernant l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne et la réglementation de la propagande haineuse sur Internet, CCDP, octobre 2008, p. 3 à 21. [ Retour au texte ]
Voir : Elisabeth Symons, « Bill C-36, Hate, the Internet, and Internet Service Providers », Information and Technology: Recent Developments for Professionals, vol. 6, mai 2002, p. 10 et 11. Pour des renseignements généraux, voir Jane Bailey, « Private Regulation and Public Policy: Toward Effective Restriction of Internet Hate Propaganda », McGill Law Journal, vol. 49, 2004. [ Retour au texte ]
Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Taylor. [ Retour au texte ]
Règlement sur la distribution de radiodiffusion, 1997 DORS/97-555. [ Retour au texte ]
Loi sur la radiodiffusion, L.C. 1991, ch. 11. Voir aussi : Règlement de 1986 sur la radio, 1986, DORS/86-982, art. 3; Règlement de 1987 sur la télédiffusion, DORS/87-49, art. 5; Règlement de 1990 sur la télévision payante, DORS/90-105, art. 3; Règlement de 1990 sur les services spécialisés, DORS/90-106, art. 3. [ Retour au texte ]
Loi sur les douanes, L.R.C. 1985, ch. 1 (2e suppl.); Tarif des douanes, L.C. 1997, ch. 36. Voir aussi : Tarif des douanes – Annexe (107 ko, 17 pages), 1er janvier 2008. [ Retour au texte ]
Pour en savoir plus, voir : Luke McNamara, « Negotiating the contours of unlawful hate speech: regulation under provincial Human Rights Laws in Canada »,University of British Columbia Law Review, vol. 38, no 1, 2005. [ Retour au texte ]
Voir : Colombie-Britannique, Human Rights Code, R.S.B.C. 1996, ch. 210, art. 7; Alberta Human Rights Act, R.S.A. 2000, ch. A-25.5, art. 3; Saskatchewan Human Rights Code (166 ko, 28 pages), S.S. 1979, ch. S-24.1, art. 4; Manitoba, Code des droits de la personne, C.P.L.M. ch. H175, art. 18; Ontario, Code des droits de la personne, L.R.O. 1990, ch. H.19, art. 3; Québec, Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q. ch. C-12, art. 10 et 11; Nouveau-Brunswick, Loi sur les droits de la personne, L.R.N.B. 1973, ch. H-11, art. 6; Nouvelle-Écosse, Human Rights Act, R.S.N.S. 1989, ch. 214, art. 7; Île-du-Prince-Édouard, Human Rights Act, R.S.P.E.I. 1988, ch. H-12, art. 12; Terre-Neuve-et-Labrador, Human Rights Code, R.S.N.L. 1990, ch. H-14, art. 14; Nunavut, Loi sur les droits de la personne, LNun 2003, ch. 12, art. 4; Territoires du Nord-Ouest, Loi sur les droits de la personne, LTN-O. 2002, ch. 18, art. 13. [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Ontario Racial Discrimination Act, 1944, S.O. 1944, ch. 51. [ Retour au texte ]
Commission ontarienne des droits de la personne, Observations présentées à la Commission canadienne des droits de la personne concernant l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne et la réglementation de la propagande haineuse sur Internet, préparé par Richard Moon, janvier 2009. [ Retour au texte ]
Boissoin v. Lund, [2009] A.J. No. 1345 et Whatcott v. Saskatchewan (Human Rights Tribunal), [2010] S.J. No. 108 (C.A.) [appel accueilli en partie, Saskatchewan (Human Rights Commission) v. Whatcott, 2013 CSC 11]. [ Retour au texte ]
Exemples de causes portant sur des questions relatives aux dispositions anti discriminatoires et anti-haine : Saskatchewan (Human Rights Commission) v. Engineering Students’ Society (1989), 10 C.H.R.R. D/5636 (Saskatchewan C.A.); Warren v. Manitoba Human Rights Commission (1985), 6 C.H.R.R. D/2777 (Manitoba C.A.), cité dans Whiteley v. Osprey Media Publishing; Owens v. Saskatchewan (Human Rights Commission), [2006] S.J. No. 221 (C.A.); Saskatchewan (Human Rights Commission) v. Bell, [1994] 5 W.W.R. 458 (Sask. C.A.); Re: Kane [2001] A.J. No. 915 (Q.B.); Stacey v. Campbell et al., 2002 BCHRT 35; Balcilek v. Kwantlen Polytechnic University, [2009] B.C.H.R.T.D. No. 366); Whiteley v. Osprey Media Publishing, 2010 HRTO 2152 (Tribunal des droits de la personne de l’Ontario); et Recalma v. Orca Sand & Gravel LP, 2010 BCHRT 335. [ Retour au texte ]
Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Taylor. [ Retour au texte ]
R. c. Keegstra, [1990] 3 R.C.S. 697. [ Retour au texte ]
Sabina Citron et autres et la Commission canadienne des droits de la personne et Ernst Zundel et d’autres, Tribunal canadien des droits de la personne, TD 1/02, 18 janvier 2002. [ Retour au texte ]
Autres affaires récentes : Warman c. Winnicki, [2006] A.C.F. no 1092; Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c. Winnicki, [2005] A.C.F. no 1838;Warman c. Tremaine, [2008] A.C.F. no 1265; et Kulbashian c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne) [2007] A.C.F. no 475. [ Retour au texte ]
Warman c. Lemire, 2009 TCDP 26. [ Retour au texte ]
Présentées précédemment dans la section 2.1, « Les lois sur les droits de la personne ». [ Retour au texte ]
Il convient de noter que l’al. 54(1.1)b) exige du TCDP qu’il tienne compte de l’intention de la personne avant d’imposer une sanction pécuniaire. Cela n’a pas été exigé dans l’arrêt Taylor, car un tel recours n’existait pas. [ Retour au texte ]
Voir : Lemire, par. 279. [ Retour au texte ]
Commission canadienne des droits de la personne c. Richard Warman et al., 2012 CF 1162 (Cour fédérale). Toutes les affaires subséquentes afférentes à l’art. 13 qui ont été portées devant le TCDP ont été suspendues en attendant l’issue de cette cause : Congrès juif canadien c. Henry Makow, 2010 TCDP 13; Ligue des droits de la personne de B’nai Brith, Abrams, Harry c. Topham, Arthur, 2010 TCDP 14; Warman c. Kulbashian et al., dossier du tribunal T869/1903 et dossier de la Cour fédérale T-572-06. [ Retour au texte ]
Saskatchewan (Human Rights Commission) c. Whatcott. [ Retour au texte ]
Saskatchewan Human Rights Code, par. 14(1). [TRADUCTION] [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Nations Unies, Assemblée générale, Conseil des droits de l’homme, Groupe de travail sur l’Examen périodique universel, Quatrième session, Résumé établi par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme conformément au paragraphe 15 c) de l’annexe à la résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme – Canada (104 ko, 20 pages), publication nº A/HRC/WG.6/4/CAN/3, 24 novembre 2008, par. 31 (PEN Canada); Association canadienne des journalistes, CAJ urges changes to human rights laws, 22 février 2008; Association canadienne des libertés civiles, Submissions to Canadian Human Rights Commission re: The Moon Report (54 ko, 12 pages), 15 janvier 2009. [ Retour au texte ]
Chambre des communes, « Motion M-446 », Feuilleton des avis, no 41, 2e session, 39e législature, 31 janvier 2008 (déposée par M. Keith Martin, Esquimalt-Juan de Fuca). [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Congrès juif canadien, Hate Speech [consulté en septembre 2010, n’est plus accessible]; B’nai Brith, B’nai Brith Canada gives mixed reviews to Moon Report on human rights commission mandate to fight hatred, communiqué, Toronto, 24 novembre 2008; « Mixed reviews: Moon report on hate speech », Jewish Tribune, 25 novembre 2008. Voir également : Chambre des communes, Comité permanent de la justice et des droits de la personne (JUST), Témoignages, 1re session, 41elégislature, 24 avril 2012, 1210 (Mark Toews, Association du Barreau canadien). [ Retour au texte ]
CCDP, Rapport spécial au Parlement : Liberté d’expression et droit à la protection contre la haine à l’ère d’Internet (2,34 Mo, 70 pages), juin 2009.[ Retour au texte ]
Ibid. La décision a été publiée par Maclean’s. Voir : Decision of the Commission: Canadian Islamic Congress v. Rogers Media Inc. (20071008) (321 ko, 4 pages).[ Retour au texte ]
Mark Steyn, « The future belongs to Islam », Maclean’s, 20 octobre 2006. [ Retour au texte ]
CCDP, Rapport spécial au Parlement (2009), p. 33. [ Retour au texte ]
Ibid. [ Retour au texte ]
L’introduction du livre est de Mark Steyn, dont le nom est mentionné plus haut. [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Maclean’s, 14 juillet 2009; The Globe and Mail (Toronto), 15 mai 2009; Financial Post, 18 avril 2009. [ Retour au texte ]
Voir p. ex. : Mark Medley, « Book Review », The National Post (Toronto), 11 avril 2009; Rex Murphy, « The right to offend the easily offended », The Globe and Mail(Toronto), 11 avril 2009; Andrew Coyne, « Human rights racket », Maclean’s, 2 avril 2009. [ Retour au texte ]
Robert Meynell, « Book Review », Quill & Quire, mai 2009; Franklin Bialystok, « The Nazi threat in the ‘60s in Canada was real », Ottawa Citizen, 11 juin 2009, p. A11; Mark J. Freiman, « Trial by Anecdote », Literary Review of Canada, 1er juin 2009; James W. St. G. Walker, « Book Review », Human Rights Quarterly, vol. 32, no 1, février 2010, p. 198 à 207. [ Retour au texte ]
Moon (2008). [ Retour au texte ]
CCDP, Rapport spécial au Parlement (2009). [ Retour au texte ]
Moon (2008), p. 3; voir aussi p. 45 à 48. [ Retour au texte ]
Ibid., p. 2. [ Retour au texte ]
Ibid. [ Retour au texte ]
CCDP, Rapport spécial au Parlement (2009), p. 1. [ Retour au texte ]
JUST (24 avril 2012), 1105 (Brian Storseth, député de Westlock-St. Paul). [ Retour au texte ]
JUST, Dixième rapport, 1re session, 41e législature, rapport adopté par le Comité le 26 avril 2012 et présenté à la Chambre le 27 avril 2012. Le Comité a entendu les témoignages d’Ezra Levant et de Mark Steyn le 5 octobre 2009 et celui de Jennifer Lynch, commissaire en chef, CCDP, le 26 octobre 2009. Voir JUST, Témoignages, 2esession, 40e législature, 5 octobre 2009; JUST, Témoignages, 2e session, 40e législature, 26 octobre 2009. [ Retour au texte ]
JUST (24 avril 2012), 1210 (Mark Toews, Association du Barreau canadien). [ Retour au texte ]
JUST, Témoignages, 1re session, 41e législature, 26 avril 2012, 1105 (Frank Dimant, vice-président exécutif, B’nai Brith). [ Retour au texte ]
Moon (2008), p. 18. L’auteur donne comme exemple Rasheed v. Bramhill (1981), 2 CHRR D/249 (Nova Scotia Board of Inquiry). [ Retour au texte ]
Le rapport cite également une observation de Luke McNamara qui affirme que cette disposition, lorsqu’on lui donne une interprétation vaste, « restreint les conduites similaires à celles visées par les lois plus générales touchant la propagande haineuse » (Moon (2008)). [ Retour au texte ]
Moon (2008), p. 53, note 64. [ Retour au texte ]
Dreaver et al. c. Pankiw, 2009 TCDP 8. [ Retour au texte ]
Statistique Canada, « Les crimes haineux déclarés par la police », Le Quotidien, 12 avril 2012; Mia Dauvergne et Shannon Brennan, Les crimes haineux déclarés par la police au Canada, 2009, Statistique Canada, 7 juin 2011; Mia Dauvergne, Les crimes haineux déclarés par la police au Canada, 2008, Statistique Canada, 14 juin 2010. [ Retour au texte ]
Annexe A – Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. 1985, ch. H-6, modifiée) articles 12 et 13
Divulgation de faits discriminatoires, etc.

  12. Constitue un acte discriminatoire le fait de publier ou d’exposer en public, ou de faire publier ou exposer en public des affiches, des écriteaux, des insignes, des emblèmes, des symboles ou autres représentations qui, selon le cas :
a) expriment ou suggèrent des actes discriminatoires au sens des articles 5 à 11 ou de l’article 14 ou des intentions de commettre de tels actes;
b) en encouragent ou visent à en encourager l’accomplissement.
Propagande haineuse

  13. (1) Constitue un acte discriminatoire le fait, pour une personne ou un groupe de personnes agissant d’un commun accord, d’utiliser ou de faire utiliser un téléphone de façon répétée en recourant ou en faisant recourir aux services d’une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement pour aborder ou faire aborder des questions susceptibles d’exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l’article 3.
Interprétation

  (2) Il demeure entendu que le paragraphe (1) s’applique à l’utilisation d’un ordinateur, d’un ensemble d’ordinateurs connectés ou reliés les uns aux autres, notamment d’Internet, ou de tout autre moyen de communication semblable mais qu’il ne s’applique pas dans les cas où les services d’une entreprise de radiodiffusion sont utilisés.
Interprétation

  (3) Pour l’application du présent article, le propriétaire ou exploitant d’une entreprise de télécommunication ne commet pas un acte discriminatoire du seul fait que des tiers ont utilisé ses installations pour aborder des questions visées au paragraphe (1).
Annexe B – Code criminel (L.R.C. 1985, ch. C-46, modifié) articles 318 à 320.1
Propagande haineuse
Encouragement au génocide

  318. (1) Quiconque préconise ou fomente le génocide est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans.
Définition de « génocide »

  (2) Au présent article, « génocide » s’entend de l’un ou l’autre des actes suivants commis avec l’intention de détruire totalement ou partiellement un groupe identifiable, à savoir :
a) le fait de tuer des membres du groupe;
b) le fait de soumettre délibérément le groupe à des conditions de vie propres à entraîner sa destruction physique.
Consentement

  (3) Il ne peut être engagé de poursuites pour une infraction prévue au présent article sans le consentement du procureur général.
Définition de « groupe identifiable »

  (4) Au présent article, « groupe identifiable » désigne toute section du public qui se différencie des autres par la couleur, la race, la religion, l’origine ethnique ou l’orientation sexuelle.
Incitation publique à la haine

  319. (1) Quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à la haine contre un groupe identifiable, lorsqu’une telle incitation est susceptible d’entraîner une violation de la paix, est coupable :
a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Fomenter volontairement la haine

  (2) Quiconque, par la communication de déclarations autrement que dans une conversation privée, fomente volontairement la haine contre un groupe identifiable est coupable :
a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;
b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Défenses

  (3) Nul ne peut être déclaré coupable d’une infraction prévue au paragraphe (2) dans les cas suivants :
a) il établit que les déclarations communiquées étaient vraies;
b) il a, de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit, ou a tenté d’en établir le bien-fondé par argument;
c) les déclarations se rapportaient à une question d’intérêt public dont l’examen était fait dans l’intérêt du public et, pour des motifs raisonnables, il les croyait vraies;
d) de bonne foi, il voulait attirer l’attention, afin qu’il y soit remédié, sur des questions provoquant ou de nature à provoquer des sentiments de haine à l’égard d’un groupe identifiable au Canada.
Confiscation

  (4) Lorsqu’une personne est déclarée coupable d’une infraction prévue à l’article 318 ou aux paragraphes (1) ou (2) du présent article, le juge de la cour provinciale ou le juge qui préside peut ordonner que toutes choses au moyen desquelles ou en liaison avec lesquelles l’infraction a été commise soient, outre toute autre peine imposée, confisquées au profit de Sa Majesté du chef de la province où cette personne a été reconnue coupable, pour qu’il en soit disposé conformément aux instructions du procureur général.
Installations de communication exemptes de saisie

  (5) Les paragraphes 199(6) et (7) s’appliquent, compte tenu des adaptations de circonstance, à l’article 318 et aux paragraphes (1) et (2) du présent article.
Consentement

  (6) Il ne peut être engagé de poursuites pour une infraction prévue au paragraphe (2) sans le consentement du procureur général.
Définitions

  (7) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

« communiquer »

« communiquer » S’entend notamment de la communication par téléphone, radiodiffusion ou autres moyens de communication visuelle ou sonore.

« déclarations »

« déclarations » S’entend notamment des mots parlés, écrits ou enregistrés par des moyens électroniques ou électromagnétiques ou autrement, et des gestes, signes ou autres représentations visibles.

« endroit public »

« endroit public » Tout lieu auquel le public a accès de droit ou sur invitation, expresse ou tacite.

« groupe identifiable »

« groupe identifiable » A le sens que lui donne l’article 318.
Mandat de saisie

  320. (1) Un juge convaincu, par une dénonciation sous serment, qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une publication, dont des exemplaires sont gardés aux fins de vente ou de distribution dans un local du ressort du tribunal, est de la propagande haineuse, émet, sous son seing, un mandat autorisant la saisie des exemplaires.
Sommation à l’occupant

  (2) Dans un délai de sept jours après l’émission du mandat, le juge adresse à l’occupant du local une sommation lui ordonnant de comparaître devant le tribunal et d’exposer les raisons pour lesquelles il estime que ce qui a été saisi ne devrait pas être confisqué au profit de Sa Majesté.
Le propriétaire et l’auteur peuvent comparaître

  (3) Le propriétaire ainsi que l’auteur de ce qui a été saisi et qui est présumé être de la propagande haineuse peuvent comparaître et être représentés dans les procédures pour s’opposer à ce qu’une ordonnance de confiscation soit rendue.
Ordonnance de confiscation

  (4) Si le tribunal est convaincu que la publication est de la propagande haineuse, il rend une ordonnance la déclarant confisquée au profit de Sa Majesté du chef de la province où les procédures ont lieu, pour qu’il en soit disposé comme peut l’ordonner le procureur général.
Disposition de ce qui a été saisi

  (5) Si le tribunal n’est pas convaincu que la publication est de la propagande haineuse, il ordonne que ce qui a été saisi soit remis à la personne entre les mains de laquelle cela a été saisi, dès l’expiration du délai imparti pour un appel final.
Appel

  (6) Il peut être interjeté appel d’une ordonnance rendue aux termes des paragraphes (4) ou (5) par toute personne qui a comparu dans les procédures :
a) pour tout motif d’appel n’impliquant qu’une question de droit;
b) pour tout motif d’appel n’impliquant qu’une question de fait;
c) pour tout motif d’appel impliquant une question mixte de droit et de fait,

comme s’il s’agissait d’un appel contre une déclaration de culpabilité ou contre un jugement ou verdict d’acquittement, selon le cas, sur une question de droit seulement en vertu de la partie XXI, et les articles 673 à 696 s’appliquent, compte tenu des adaptations de circonstance.
Consentement

  (7) Il ne peut être engagé de poursuites en vertu du présent article sans le consentement du procureur général.
Définitions

  (8) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

« génocide »

« génocide » A le sens que lui donne l’article 318.

« juge »

« juge » Juge d’un tribunal.

« propagande haineuse »

« propagande haineuse » Tout écrit, signe ou représentation visible qui préconise ou fomente le génocide, ou dont la communication par toute personne constitue une infraction aux termes de l’article 319.

« tribunal »

« tribunal »
a) Dans la province de Québec, la Cour du Québec;
a.1) dans la province d’Ontario, la Cour supérieure de justice;
b) dans les provinces du Nouveau-Brunswick, du Manitoba, de la Saskatchewan et d’Alberta, la Cour du Banc de la Reine;
c) dans les provinces de l’Île-du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve, la Section de première instance de la Cour suprême;
c.1) [Abrogé, 1992, ch. 51, art. 36]
d) dans les provinces de la Nouvelle-Écosse et de la Colombie-Britannique, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, la Cour suprême;
e) au Nunavut, la Cour de justice.
Mandat de saisie

  320.1 (1) Le juge peut, s’il est convaincu par une dénonciation sous serment qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’il existe une matière — qui constitue de la propagande haineuse au sens du paragraphe 320(8) ou contient des données, au sens du paragraphe 342.1(2), qui rendent la propagande haineuse accessible — qui est emmagasinée et rendue accessible au public au moyen d’un ordinateur au sens du paragraphe 342.1(2) situé dans le ressort du tribunal, ordonner au gardien de l’ordinateur :
a) de remettre une copie électronique de la matière au tribunal;
b) de s’assurer que la matière n’est plus emmagasinée ni accessible au moyen de l’ordinateur;
c) de fournir les renseignements nécessaires pour identifier et trouver la personne qui a affiché la matière.
Avis à la personne qui a affiché la matière

  (2) Dans un délai raisonnable après la réception des renseignements visés à l’alinéa (1)c), le juge fait donner un avis à la personne qui a affiché la matière, donnant à celle-ci l’occasion de comparaître et d’être représentée devant le tribunal et de présenter les raisons pour lesquelles la matière ne devrait pas être effacée. Si la personne ne peut être identifiée ou trouvée ou ne réside pas au Canada, le juge peut ordonner au gardien de l’ordinateur d’afficher le texte de l’avis à l’endroit où la matière était emmagasinée et rendue accessible, jusqu’à la date de comparution de la personne.
Personne qui a affiché la matière : comparution

  (3) La personne qui a affiché la matière peut comparaître et être représentée au cours de la procédure pour s’opposer à l’établissement d’une ordonnance en vertu du paragraphe (5).
Personne qui a affiché la matière : non comparution

  (4) Si la personne qui a affiché la matière ne comparaît pas, le tribunal peut statuer sur la procédure, en l’absence de cette personne, aussi complètement et effectivement que si elle avait comparu.
Ordonnance

  (5) Si le tribunal est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que la matière est accessible au public et constitue de la propagande haineuse au sens du paragraphe 320(8) ou contient des données, au sens du paragraphe 342.1(2), qui rendent la propagande haineuse accessible, il peut ordonner au gardien de l’ordinateur de l’effacer.
Destruction de la copie électronique

  (6) Au moment de rendre une ordonnance en vertu du paragraphe (5), le tribunal peut ordonner la destruction de la copie électronique qu’il possède.
Sort de la matière

  (7) Si le tribunal n’est pas convaincu que la matière est accessible au public et constitue de la propagande haineuse au sens du paragraphe 320(8) ou contient des données, au sens du paragraphe 342.1(2), qui rendent la propagande haineuse accessible, il doit ordonner que la copie électronique soit remise au gardien de l’ordinateur et mettre fin à l’ordonnance visée à l’alinéa (1)b).
Application d’autres dispositions

  (8) Les paragraphes 320(6) à (8) s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, au présent article.
Ordonnance en vigueur

  (9) L’ordonnance rendue en vertu de l’un des paragraphes (5) à (7) n’est pas en vigueur avant l’expiration de tous les délais d’appel.

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