mardi 26 novembre 2013

Le voile comme diversion



Je ne suis ni pour ni contre la charte de la laïcité proposée par le gouvernement du Québec. Je ne vois pas pourquoi je trancherais un sujet aussi complexe, à part la polarisation des opinions qui oblige à nous positionner dans un camp ou dans l'autre et nous donne l'épouvantable impression d'être en guerre civile. Je préfère poser des questions.

Le Québec est une terre d'accueil pour les immigrants de toutes les nations depuis 500 ans. Une terre promise, un petit paradis de l'or bleu. Les francophones se sont taillé une place de choix en Amérique et ont solidifié leur pierre d'assise avec la loi 101 en 1976. Désormais, dans la suite logique de la Révolution tranquille, disent certains, la laïcisation du Québec parviendrait à son apogée grâce à l'interdiction du port de signes religieux ostentatoires par les employés de l'État.

Nous avons banni les cours de religion dans nos écoles publiques, car nous avons compris que l'apprentissage des dogmes religieux n'était pas avantageux pour le développement de la pensée chez les jeunes enfants.

Plus les dogmes sont érigés en bas âge, plus ils sont solides. Il devient difficile ensuite, pour un individu qui a grandi dans cet endoctrinement, même parvenu à l'âge adulte, d'avoir une pensée critique face à ces dogmes.

La religion devient donc un problème lorsqu'elle est martelée dans la tête des jeunes. Pendant que l'on s'obstine à savoir si oui ou non, une éducatrice de CPE devrait enlever son foulard lorsqu'elle travaille, afin de ne pas troubler les enfants avec sa différence - et, non, il ne s'agit pas simplement d'un fichu, de boucles d'oreille, ou d'un t-shirt avec une feuille de pot, car on n'en parlerait plus depuis longtemps - le gouvernement subventionne encore des écoles privées à vocation religieuse, dont les écoles juives, musulmanes et chrétiennes orthodoxes.

Pourquoi s'obstine-t-on pour un foulard, alors que nous, les contribuables, subventionnons 106 millions de dollars à 80 écoles à vocation religieuse (Francis Vailles, La Presse, 23 septembre 2013)? Ça, on n'en parle même pas dans la fameuse Charte, ça n'est même pas remis en question.

Nous sommes en train de nous faire avoir solidement! Le foulard fait diversion, pendant que la vraie laïcité fait défaut dans 80 écoles subventionnées par le gouvernement du Québec. Et l'on prône la laïcité de l'État pendant que l'on accorde de l'aide financière aux mouvements religieux: «exemptions d'impôts aux bâtiments religieux, crédits d'impôt sur les dons aux organismes religieux, exemptions de douanes sur certains produits religieux, déductions d'impôts sur le logement des religieux, etc.» (Francis Vailles, La Presse, 23 septembre 2013).

Maintenant la grande question: l'argent vient du provincial pour ce qui est des écoles, mais la décision est-elle canadienne? Basée sur la Charte des droits et libertés de la personne?

Nous venons d'allumer un feu, maintenant il faut le maîtriser et le contenir. Alors, lorsque j'entends les purs s'autoproclamer progressistes parce qu'ils souhaitent imposer à une minorité de femmes musulmanes le retrait de leur hijab, je me dis qu'il y a des idées qui illustrent mieux le progrès. Un combat économique qui coûterait moins cher à l'État, et qui renverrait aux croyants orthodoxes tous les déboursés reliés à leur propre foi, ça me paraît nettement plus progressiste. Non?

source : La Presse.ca


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