mardi 10 décembre 2013

L’évolution de l’identité québécoise



Il n’y a pas si longtemps, l’identité québécoise se déclinait par la langue française et la foi catholique. Pour faire bonne mesure, j’ajouterais le régime seigneurial qui a quadrillé les terres de la vallée du Saint-Laurent, définissant un mode particulier de tenure des terres encore observables aujourd’hui dans nos campagnes, et un taux de fécondité remarquable qui s’est traduit par de nombreux liens interfamiliaux par unions successives, justifiant la maxime que le – « Québec est tissé serré ».
Que reste-il aujourd’hui de ces identifiants ? Les derniers indices linguistiques laissent croire que la langue française s’érode lentement mais sûrement. Le débat sur la laïcité de l’État québécois s’est soldé par une charge de cavalerie contre l’Islam, confondant Islam et Islamisme, sans doute pour cacher l’ambiguïté des francophones à l’égard de leur propre héritage chrétien de confession catholique. Car, vous avez probablement comme moi, dans votre parentèle, des gens qui se marient religieusement à l’église, y font baptiser leur progéniture et se font accompagner vers leur repos éternel par des rites religieux, même en 2013, bientôt 2014… !
D’aucuns voudraient extrader, effacer, oublier le religieux, le bannir à jamais de l’espace public : « Cachez cette soutane que je ne saurais voir, éloignez de ma vue ce voile que je ne saurais souffrir ». Mais, le phénomène religieux accompagne l’humanité depuis l’Aube des Temps et cherche à répondre à des questions aussi fondamentales que le sens de la vie humaine, son utilité, sa nécessité à l’échelle géologique, des centaines de millions d’années, ou à l’échelle cosmique, des milliards d’années.
À une échelle plus modeste (!), l’Assemblée nationale du Québec a adopté le 14 juin 2000 la Loi modifiant diverses dispositions législatives dans le secteur de l’éducation concernant la confessionnalité. Les services d’animation pastorale ou religieuse dans les écoles primaires et secondaires ont été remplacés par un service d’animation spirituelle et d’engagement communautaire financé par l’État (SASEC). Ce qui n’a pas empêché le même État de continuer à financer les écoles privées confessionnelles, ni les animatrices et animateurs de vie spirituelle et d’engagement communautaire (AVSEC), qui doivent travailler dans 8, 10 ou même 15 écoles, de réclamer à cor et à cri plus de ressources pour satisfaire aux exigences de la loi et aux vœux des parents.
En somme, une laïcisation partielle faute d’un financement adéquat. Ce déficit de cohérence me porte à croire qu’au lieu d’engager le difficile débat sur la laïcité, il aurait mieux valu, avant de déshabiller la première musulmane rencontrée, sonder les cœurs et les reins des québécois, en procédant à une vaste enquête sociologique sur les attentes, les convictions et les souhaits de nos concitoyens à l’égard de leur héritage religieux. L’Institution catholique, par exemple, ne peut vivre des seuls baptêmes, mariages et sépultures quand ils se présentent au bon vouloir de ses brebis errantes.
De ce qui précède, faut-il comprendre que le Québec demeure avant tout une terre chrétienne, principalement catholique, et que les autres confessions religieuses y sont tolérées en autant qu’elles soient invisibles ? Ce pourrait-il aussi que le vigoureux débat sur la laïcité ait un arrière-goût de pétrole : « Passons-nous du pétrole des pays arabo-musulmans, au profit du pétrole bien de chez-nous, celui de l’Alberta, d’Anticosti ou du golfe Saint-Laurent » ?!? Ceci justifiant cela, est-ce que l’opinion publique aurait été manipulée à ce point ? C’est une hypothèse qui carbure, il est vrai, à la paranoïa, mais bon l’époque s’y prête à merveille !
Femmes et religion
D’autres encore voient dans le phénomène religieux un outil d’asservissement des femmes. Le Québec n’étant pas une société musulmane, faut-il rappeler que les québécoises n’ont obtenu le droit de vote qu’en 1940, après les autres provinces canadiennes ? Elles ont obtenu les mêmes droits que leurs époux en 1964, lorsque le Parlement québécois a adopté le bill 16 (projet de loi 16), patronné et présenté par madame Claire Kirkland, la première femme à entrer à l’Assemblée législative du Québec. Cette loi abolissait l’incapacité juridique de la femme mariée, reconnaissait l’égalité juridique des époux ainsi que le droit de la femme d’exercer les responsabilités civiles ou financières qui lui étaient jusqu’alors interdites. L’épouse pouvait désormais effectuer des transactions courantes, intenter un procès ou encore être exécutrice testamentaire.
Les religions ne sont pas le seul vecteur de l’oppression des femmes. L’évolution des cinquante dernières années au Québec démontre amplement que les femmes savent très bien s’occuper d’elles-mêmes, et n’ont nul besoin d’être « paternées » ou maternées. C’est à elles d’user avec discernement de leur liberté si chèrement acquise. À elles également l’initiative d’amorcer un dialogue fructueux avec leurs consœurs fraîchement débarquées (légalement) chez nous.
http://www.vigile.net/L-evolution-de-l-identite

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