Djemila Benhabib s'oppose à la vision du port du voile islamique présentée par le Musée des religions du monde de Nicolet.
(Nicolet) À peine lancée, la nouvelle exposition du Musée des religions du monde de Nicolet, Et voilà, le voile musulman dévoilé, suscite déjà de l'opposition. L'écrivaine Djemila Benhabib accuse notamment l'établissement de faire de la propagande à travers cette exposition en démontrant seulement le côté positif associé au port du voile.
Pour l'auteure de Ma vie à contre-Coran, la vision exposée par le musée a pour effet de camoufler tous les côtés sombres de ce délicat sujet. «Le musée n'a pas à nous dire quoi penser. Ce n'est pas correct d'avoir un parti pris de cette façon-là. Ce n'est pas correct de brouiller tout le contexte dans lequel s'inscrit le port du voile islamique. Une prison demeure une prison.
«Qu'importe qu'elle soit dorée, rose ou verte, c'est une prison. Le voile islamique est une forme d'oppression et d'asservissement des femmes», souligne l'ex-candidate péquiste dans Trois-Rivières, tout en s'offusquant que l'établissement ait bénéficié de fonds publics pour ce projet.
Djemila Benhabib déplore notamment que cette vision «rose bonbon» du port du voile relègue aux oubliettes de tragiques événements comme les assassinats des quatre femmes de la famille Shafia, en Ontario, tuées pour avoir bafoué l'honneur familial en refusant de vivre selon les traditions afghanes.
«Ces quatre femmes ne souhaitaient pas porter le voile islamique. Je ne vois pas pourquoi elles n'auraient pas leur place dans une telle exposition», ajoute-t-elle.
Le directeur général du Musée des religions du monde, Jean-François Royal, se défend bien de vouloir imposer sa vision des choses aux visiteurs. En présentant cette exposition, il souhaite surtout briser les barrières et certains préjugés.
«La mission du musée est de parler des cinq grandes traditions religieuses et faire une plus grande ouverture à la tolérance et la compréhension. On veut dire aux gens que les musulmans, ce n'est pas juste les Arabes. Aussi, on veut montrer qu'il n'y a pas juste le côté négatif qui existe. On ne veut pas jouer à l'autruche et se dire qu'on ne voit qu'une belle facette du sujet mais on veut juste
dire que cette facette existe», explique-t-il.
«Il faut arrêter de penser que tous les gens voilés sont automatiquement des musulmans battus et contraints. Oui, il y a en a, on le sait et on en parle abondamment. Mais il y a aussi des gens qui le font par choix religieux», ajoute le directeur général du musée.
Pour l'instant, Djemila Benhabib ne va pas jusqu'à réclamer la fermeture de l'exposition. Elle souhaite simplement rappeler à la population les aspects néfastes et contraignants du port du voile.
«Pour le moment, je réagis seulement. Ça va être aux Québécois de décider quoi faire avec cette exposition. Je ne fais que m'exprimer en tant que citoyenne en fonction de ce que je sais. J'ai une expertise dans ce domaine et je réfléchis sur cette question depuis plus de 20 ans», rappelle l'auteure qui prévoit se rendre à Nicolet pour visiter l'exposition mercredi prochain.
À ce sujet, M. Royal trouve la réaction de l'ex-candidate péquiste un peu trop vive, surtout compte tenu qu'elle ne l'a pas encore vue. «Je trouve exagéré de voir l'exposition comme un outil de propagande. Je ne vois pas quelle menace elle sent», mentionne-t-il, bien calmement.
Source : La Presse
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